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Mémoires d'un solibataire
8 février 2014

Un homme inachevé

Ceci n'est pas la caisse de résonnance de la théorie dite de "l'homme inachevé". Je ne parle pas de neurobiologie. Ce n'est pas non plus le témoignage d'une crise mystique mais l'expression d'un ressenti. Un homme inachevé ? Son antonyme est un homme complet, achevé ou fini. Parler de l'homme, autrement dit : parler de soi, revient à parler de l'autre, du monde et de leurs relations.

 

Avec Descartes, nous pouvons affirmer que nous n'avons pas besoin de l'autre pour exister. Cogito ergo sum ! Je pense donc je suis ! La pensée relève de l'intime et ne saurait s'aliéner. Encore que la sociologie pourrait nous contredire sur la base du mimétisme social, culturel, etc... Le libre-arbitre est, en effet relatif, pour Spinoza. Et si nos choix, manifestant ce libre-arbitre, ressentent le poids de la contrainte extérieure (nature, famille, communauté...), notre pensée ne saurait être épargnée par ce fardeau, elle qui détermine nos choix. Nous savons aussi que l'homme n'est pas une île complète en lui-même. Nous sommes des êtres sociaux et grégaires. Sans doute est-ce le reflet de la loi de la sélection naturelle de Darwin. Nous survivons en groupe, non pas isolément. Je pense donc je suis, seul, mais, au regard de ma nature, je ne saurais exister indépendemment du regard de l'autre. Ce regard, selon l'adage populaire, est le miroir de l'âme sans que l'on puisse déterminer s'il s'agit de celle de l'observateur ou de celui qui est observé.

 

Pris isolément nous sommes incomplets. Il n'est pas bon d'être seul. La formule vient de la Genèse. Adam, le premier homme, se voit associer un autre être, Eve. Peut-être ce texte d'essence religieuse n'a-t-il eu, à son origine, d'autre vocation que d'expliquer pourquoi le monde qui se présentait aux hommes de l'Antiquité était tel qu'il se manifestait à eux. Cette hypothèse en vaut bien une autre, après tout. Poser l'évidence est en soi le B-A BA de l'expérimentation scientifique. Mais on peut extrapoler bien d'autres choses. Notamment, comme le firent les premiers exégètes, affirmer qu'il y a une distinction de nature entre Adam et la seconde étape : Adam-Eve. Ici Adam serait un être complet, un homme achevé. Le couple Adam-Eve, donnant le jour à la distinction des sexes (anticipant la théorie du genre), marquerait quant à lui l'homme inachevé.

 

De là découle l'idée de cette moitié qui nous fait défaut. Moitié d'orange pour ceux qui sont d'humeur printanière. Cette moitié est la part de féminité dans l'homme, ainsi que la part de masculinité dans la femme. C'est une loi biologique mais aussi une loi magnétique, indépendamment de la part de subjectivité des coeurs, que l'union des contraires. Il s'ensuit une recherche pour réunir ces deux moitiés, non pour les additionner, mais pour retourner à une unité originelle, celle de l'homme complet ou achevé. Cette moitié est loin de l'image des contes de fée ou des mélos sirupeux. Elle est indépendante de son état-civil, de son matricule de sécurité sociale ou de son code RFID. Elle est "l'autre" dans son essence. L'autre essentiel, donc, parce que c'est elle.

 

Elle est ce regard qui nous est un miroir, celui de notre âme. Elle est la moitié qui révèle l'existence de l'être éthéré comme de l'être matériel, incarné. Elle est cette moitié sans laquelle nous ne sommes qu'imbécile, étymologiquement "bancal". Sans laquelle nous ne sommes qu'un homme inachevé.

 

C'est pourquoi nous avons besoin de l'autre pour exister, en-dehors de notre être intime qui nous est propre, personnel, à l'image de notre pensée flattant l'ego. A défaut, il nous manque une assise pour affirmer que nous sommes un être complet, achevé et épanoui. A défaut, nos marottes valent transfert, compensation et nous privent de leur intérêt véritable. Parfois, ces marottes se vident de leur attrait pour ceux qui recherchent le vrai et le juste, faute, car cela ne peut être qu'une faute, d'être armé pour accueillir cette moitié inconnue de nous-même, faute de l'entendre, faute de la voir, faute de la toucher. Faute d'être achevé.

 

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Commentaires
S
Nous existons dans le regard de l'autre et c'est ce regard qui est un miroir en ce qu'il nous renvoie l'image que nous donnons de nous même. Et cette image est souvent différente de celle que nous souhaitions donner ou même ne se trouve pas en phase avec l'idée que nous nous faisons de nous même. Nous sommes maladroits et l'autre se révèle aussi parfois aussi muet que l'objet "miroir". Ce n'est pas le narcissisme qui est ici en cause. C'est la différence que nous cherchons dans l'autre et non ce qui nous unit. Mais ce dialogue souvent vient à manquer, en tout cas dans mon existence.<br /> <br /> <br /> <br /> L'inachèvement ne se résout pas nécessairement par une vie de couple Encore que parfois cela doit exister. Mon propos est plus primaire que cela... Je suis solibataire. Ce qui signifie que je n'ai pas forcément dans ma vie l'occasion de me "compléter". Je sais que ce n'est pas toujours un discours facile à faire accepter. Mais l'être humain étant un être sexué et sensuel, je ne vois pas en quoi il est considéré comme malvenu d'évoquer "le bouche-trou", le coup d'un soir", "la roue de secours", "l'hygiène" etc... Contrairement à vous, je n'ai pas eu souvent l'occasion de me sentir désiré et encore moins de me retrouver dans un lit ou ailleurs au gré de l'imagination fertile dont l'humanité est capable. Ce n'est donc pas un jugement que je porte. Au contraire, il paraît que c'est dans l'ordre des choses mais c'est un ordre qui me fait plus souvent qu'à mon tour défaut. Il en résulte un déséquilibre certain dans ma petite vie. Donc pour être très clair, au cas où mes posts ne le seraient pas, j'ai d'autant moins de vie affective que je n'ai pas de vie sexuelle. Il se trouve que j'ai du mal à reporter mon affection sur des poissons rouges ou des cochons d'Inde, en guise d'objets substitutifs. Et ce n'est vraiment pas un choix de vie, de ma part. D'où mes insupportables lamentations pour les lecteurs de ce blog.<br /> <br /> <br /> <br /> Pour aller au-delà de l'apparence, pour en revenir à votre propos, il faut se connaître. Soi-même d'abord, ce qui est important. Cela passe par l'introspection mais aussi par l'échange avec les autres, lequel nous révèle parfois des tours insoupçonnés nous concernant. Il faut aussi découvrir l'autre et amener l'autre à nous connaître. Cela suppose le dialogue, ainsi que l'observation. Si vous vous dévoilez difficilement, alors bienvenue au club. Il faut cependant trouver sa place dans le rapport à l'autre et qu'un minimum de confiance s'installe. C'est plus confortable et beaucoup plus réaliste pour s'apprivoiser. Si le dialogue se réduit à la juxtaposition de monologues alors c'est peine perdue. Enfin c'est mon opinion.
V
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> vous arrive t-il d'être un peu moins manichéen..point de jugement ou de reproches dans ces mots. Juste un sentiment après la lecture de quelques uns de vos articles.<br /> <br /> <br /> <br /> Je respecte bien évidement votre point de vue. Je n'ai jamais considéré l'autre comme un miroir. Surtout pas comme un miroir. Il n'est en rien la projection narcissique de mes propres désirs ou fantasmes. Surtout pas un imaginé.<br /> <br /> C'est justement parce qu'il n'est pas moi, ni moitié, ni quart d'ailleurs, que l'autre va me séduire (je ne parle pas ici uniquement de séduction amoureuse).<br /> <br /> Suis-je une femme inachevée parce que je ne suis pas en couple...non je ne le pense pas. L'échange me manque , le partage aussi bien sûr.<br /> <br /> Par facilité ou lâcheté, il m'est arrivé de jouer un rôle, parce que pour un temps c'est agréable, pour ne pas être seule. Dans le regard de l'homme je voyais du désir (i.e une attirance physique pour mon "enveloppe") J'imagine que j'étais alors pour lui un miroir.<br /> <br /> Quand je croisais mon regard dans le miroir, mon jugement était plus sévère: j'aurais aimé qu'il soit attiré l'essence plus que par l apparence.<br /> <br /> A ma charge, je dévoile difficilement qui je suis...<br /> <br /> <br /> <br /> J'aime ce mot "apprivoiser", ...cela demande du temps. l'époque ne s'y prête guère. J'aime à penser que c'est encore possible.<br /> <br /> <br /> <br /> C'est décousu, désolée.
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